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Littetsoc
19 octobre 2015

Dans le Transsibérien

Or, un vendredi matin, ce fut enfin mon tour

On était en décembre

Et je partis moi aussi pour accompagner

le voyageur en bijouterie qui se rendait à Kharbine

Nous avions deux coupés dans l’express et 34 coffres de joaillerie de Pforzheim

De la camelote allemande “Made in Germany”

Il m’avait habillé de neuf, et en montant dans le train j’avais perdu un bouton

– Je m’en souviens, je m’en souviens, j’y ai souvent pensé depuis –

Je couchais sur les coffres et j’étais tout heureux de pouvoir jouer avec le browning nickelé

qu’il m’avait aussi donné

J’étais très heureux insouciant

Je croyais jouer aux brigands

Nous avions volé le trésor de Golconde

Et nous allions, grâce au transsibérien, le cacher de l’autre côté du monde

Je devais le défendre contre les voleurs de l’Oural

qui avaient attaqué les saltimbanques de Jules Verne

Contre les khoungouzes, les boxers de la Chine

Et les enragés petits mongols du Grand-Lama

Alibaba et les quarante voleurs

Et les fidèles du terrible Vieux de la montagne

Et surtout, contre les plus modernes

Les rats d’hôtel

Et les spécialistes des express internationaux.

 

Blaise Cendrars, extrait de Prose du Transsibérien et de la petite Jehanne de France, 1913

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